Le retour au carnet en papier ?

Je lis en numérique depuis 2010, année de l’achat de ma première liseuse, une Sony eReader d’une diagonale de cinq pouces. Depuis 2020, je lis sur une Kindle Oasis, de loin une des meilleures liseuses au monde. Je ne parlerai pas des nombreux avantages de la lecture numérique. Pour moi, cela relève d’une évidence, mais je laisse ceux et celles qui apprécient l’odeur de l’encre dans un livre neuf penser ce qu’ils veulent. Cela ne m’atteint plus depuis longtemps, car je sais que j’ai raison, et qu’eux ils ont tort. Voilà tout.

Récemment, dans ma redécouverte de l’écrivaine belge Amélie Nothomb, j’ai lu plusieurs de ses romans, dont Psychopompe qui m’a fortement impressionné. Cela m’a amené d’ailleurs à rédiger un billet que vous pouvez lire sur mon blogue : Amélie Nothomb et l’écriture. Pour compléter cette lecture, je suis allé écouter l’autrice elle-même sur YouTube. C’est là qu’elle raconte comment elle écrit, de quatre à huit heures du matin, chaque jour, qu’il pleuve ou qu’il neige, avec un stylo Bic Cristal à l’encre bleue, dans des cahiers lignés. Elle le répète d’ailleurs dans d’autres entretiens qu’elle a accordés sur cette chaîne. Elle ne s’en cache pas ; c’est son mode de vie, exigeant, certes, mais c’est le sien. Et chacun vit sa vie comme il l’entend. Pour elle, l’écriture répond à une nécessité intérieure tellement vitale qu’elle est prête à y sacrifier la santé. Pour ma part, je me contente de mes cinq cents mots par jour, rédigés directement au clavier en utilisant une application de prise de notes.

N’empêche que les derniers écrits – et propos sur YouTube – d’Amélie Nothomb m’ont ébranlé, au point où je me demande si je ne vais pas tenter un retour à l’écriture manuscrite. Il y a quelques mois, je m’étais exprimé sur la question dans un billet publié sur mon blogue principal : À propos de l’écriture manuscrite. Et puis je me suis souvenu que mes deux premiers écrits – Le bout de l’île et Des nouvelles du bout de l’île – publiés respectivement en 2009 et en 2011, ont d’abord été rédigés dans des cahiers non lignés d’une marque suédoise que je ne trouvais qu’à Genève, ville où j’ai habité de 2002 à 2004. En revanche, mon recueil de nouvelles La diversité du monde (2017) a été écrit sur un téléphone, un BlackBerry Passport. Que penser de tout ça ? Est-ce qu’une méthode en vaut une autre ? Je pense foncièrement que oui.

N’empêche que je vais essayer de revenir à l’écriture manuscrite. Je crains la perte de temps que risque d’occasionner le va-et-vient entre le stylo et le clavier. Car ce que j’aurai consigné dans un cahier, il faudra bien que je le retranscrive un jour ou l’autre dans un fichier, non ? À ma connaissance, à l’exception de Réjean Ducharme (1941-2017) – pas de lien de parenté direct avec moi – aucun écrivain n’a soumis à Gallimard un manuscrit, c’est-à-dire un texte entièrement rédigé à la main, à des fins de publication. Dans le cas de cet écrivain – le premier Québécois à se faire publier chez Gallimard -, le manuscrit a été accepté… Un tour de force qui nous donne une indication sur le style incomparable de cet auteur.

Bref, je vais essayer d’écrire un peu à la main. Et j’en ferai une routine quotidienne pendant un certain temps. Je vous reviendrai dans un billet ultérieur pour vous dire ce que ça va donner . Mais je vous le dis franchement : je suis pessimiste sur les résultats escomptés, même si dans mon cas la routine l’emporte sur la finalité, ou plutôt elle constitute la finalité même…