Henri Vernes : Bob Morane 18 : Les monstres de l'espace
Daniel Ducharme | Lectures | 2022-04-01
Ce 18e Bob Morane débute alors que notre héros marche tranquillement près des quais de la Seine où il a son appartement. Au kiosque, la vendeuse de journaux le reconnaît ; il lui achète un journal, puis va s'assoir dans un restaurant du coin. Le journal ouvert devant lui, il tombe sur une nouvelle qui l'intéresse : un aérolithe est tombé à Centrafrique, en plein territoire Balébélé, une tribu qui interdit à quiconque de poser les pieds sur son territoire ancestral. Suite à cet incident, des choses étranges se passent, choses rapportées par un Blanc, le seul à être admis en pays Balébélé : Allan Wood. Le lecteur a pu faire la connaissance de cet ami de Bob Morane dans La vallée des brontosaures, un roman qui, à l'instar de celui-ci, se passe à Centrafrique, même si l'auteur fait parfois allusion à l'Ouganda, pays qui n'a pourtant pas de frontière commune avec la République centrafricaine. Bon, nous sommes toujours en 1956, période qui précède le mouvement de décolonisation des pays d'Afrique, donc tout n'est pas encore coulé dans le béton en matière de géographie, surtout quand les tracés frontaliers sont établis par les Occidentaux.
Une fois de retour chez lui, Morane reçoit un appel d'un autre personnage récurrent dans ses aventures : le professeur Clairembart, un vieux savant qui n'est pas sans rappeler le professeur Tournesol dans les Tintin. Quelques jours plus tard, le voici dans l'appartement de Bob Morane accompagné de Paul Rivière, un spécialiste passionné par la vie extraterrestre. Après, tout va très vite : les deux savants convainquent notre héros de partir à Centrafrique avec eux et, surtout, d’intercéder auprès d'Allan Wood, ami de Bankutuh, chef des Balébélés, afin d'obtenir l'autorisation de pénétrer sur leur territoire ancestral. Peut-être est-ce une pure coïncidence mais, après la tombée de l'aérolithe, des monstres auraient commencé à terroriser les populations locales, n'hésitant pas à anéantir les hommes comme les animaux. Paul Rivière est convaincu qu'il s'agit là d'une présence extraterrestre sur la Terre ; il veut en avoir le cœur net.
Une fois à Centrafrique, une expédition se met en route en direction du territoire des Balébélés. Elle est composée des quatre Européens, des deux fidèles serviteurs d'Allan Wood et de quelques porteurs. Rapidement, Morane et ses compagnons remarquent que le comportement de la faune s'avère inhabituel, comme si on sentait la peur dans le mouvement des animaux, y compris les plus féroces comme les lions et les rhinocéros. Sur le chemin des monstres de l'espace, comme il est convenu de les appeler, nos amis sont malheureusement attaqués par les Bakubis, les fameux hommes-léopards que l'auteur nous a fait connaître dans La vallée des brotonsaures. Au cours de l'attaque, Bob Morane est capturé et, comme il arrive souvent dans ces romans, il est attaché au poteau du centre du village, prêt à servir de pâture aux Bakubis pour leur crime rituel. Mais voilà que le fameux monstre, dont la forme rappelle une limace obèse, déboule au village et tue un à un tous les Bakubis qui n'ont pas pu fuir à temps. Bob Morane s'en sort indemne, détaché un peu plus tard par ses amis qui le croyaient mort depuis longtemps. Finalement, après quelques tentatives, ils finissent par détruire le monstre de l'espace. En guise de consolation, le professeur Rivière emmène avec lui, en France, un morceau de l'aérolithe pour en étudier la composition dans son laboratoire.
Est-ce la fin du roman ? Non, bien entendu. En France, dans la région du massif central, Paul Rivière étudie dans son laboratoire le fragment de l'aérolithe. Ses analyses lui permettent d'identifier une forme de vie, un microbe en fait, un microbe qui grossit à vue d'œil au contact des rayons ultraviolets. Rapidement le microbe se transforme en « macrobe », bref en monstre, et ce monstre de l'espace finit par fuir le laboratoire pour se réfugier dans la forêt. Craignant pour la vie des habitants du coin, Paul Rivière fait appel à ses amis, Bob Morane et le professeur Clairembart, qui arrivent à la rescousse. Échouant dans leurs tentatives de tuer le monstre, ils font appel à l'armée qui, elle aussi, s'avère impuissante. Mais le monstre finit par s'éteindre, comme celui de Centrafrique qui s'est englouti dans un marécage. Pourquoi ? Par respect pour Henri Vernes, je vous invite à lire le roman pour le savoir...
Les monstres de l'espace est un bon Bob Morane. Certes, il ressemble à certains romans précédents, et la vision qu'a l'auteur des Africains s'avère franchement dépassé, mais il offre au lecteur adolescent de la fin des années 1950 une intrigue assez corsée pour qu'il n'ait pas envie de lâcher le bouquin avant de savoir ce qui va se passer. Quant à nous, lecteurs adultes et cultivés, l'intérêt de ce 18e Bob Morane réside essentiellement dans le fait qu'il s'agit de la première incursion d'Henri Vernes dans la science-fiction. Très bientôt, quand la décolonisation du monde offrira peu de matière à l'aventure, il adoptera ce genre littéraire pour de bon.
Henri Vernes. Bob Morane 18 : Les monstres de l'espace. Éd. Gérard & Cie, 1956