Marie-Andrée Mongeau n'est plus
Daniel Ducharme | Idées | 2023-09-01
Atteinte d'une maladie, aussi fulgurante qu'incurable, Marie-Andrée Mongeau, dite la spéciale, a demandé - et obtenu - l'aide médicale à mourir. Conséquemment, elle a été euthanasiée le 29 août 2023 à 9h30 en présence de ses proches. Une lourde perte pour l'équipe d'ÉLP qui s'était liée d'amité avec elle depuis la parution de son premier roman en 2015. Écrivaine de talent, certes, mais aussi contributrice d'ÉLP éditeur par la révision extrêmement serrée qu'elle a faite de nos derniers ouvrages, elle nous manquera.
Je ne l'ai rencontrée qu'une seule fois depuis qu'elle a rejoint les rangs d'ÉLP en 2015. C'était quelque part entre 2016 et 2017 dans un restaurant du quartier latin, en compagnie de Paul Laurendeau. Au cours du repas, elle m'a demandé si je voulais bien consigner par écrit des souvenirs de l'été 1976, période lointaine où, lors d'une semaine de vacances à Québec, elle s'était jointe au groupe d'amis que nous formions pour les circonstances, des anciens du Collège de l'Assomption pour la plupart. Au cours de cette semaine-là, elle a ressenti du rejet de la part du groupe et, puisque ça venait de sa meilleure amie, du moins le croyait-elle, elle en a gardé un souvenir désagréable. À sa demande, je me suis prêté au jeu, commençant à écrire des textes pour chacun des six jours de ce ce séjour à Québec, qui s'est déroulé au mois d'août 1976, juste après les Jeux olympiques. J'envoyais un texte à Marie-Andrée écrit au "je", incarnant le personnage de Gaby, et elle m'envoyait son propre texte sous les traits de Liliane. Ces textes en alternance ont fini par donner un roman, L'été olympique, publié en 2019, une oeuvre sans prétention sur les sentiments confus que pouvaient ressentir de jeunes adultes d'il y a cinquante ans.
Après l'été 1976, donc, je n'ai plus revue Marie-Andrée. Pendant que je faisais des études en philosophie et en histoire, elle étudiait à l'Institut maritime de Rimouski pour apprendre le métier de mécanicienne de navire, métier assez peu courant pour une femme, comme vous pouvez l'imaginer. Elle a d'ailleurs raconté sa vie maritime dans deux romans : Le Magicien de la mer ne fait pas de miracle (2016) et Chroniques de la Gypco (2018). Après sa carrière de mécanicienne de navire, elle s'était retirée dans ses terres, à une cinquantaine de kilomètres de Rimouski, et elle s'était mise à l'écriture, tout en donnant des cours de temps en temps pour l'établissement d'enseignement qu'il l'avait formé.
Marie-Andrée Mongeau était une femme déterminée qui s'exprimait souvent sans filtre. Fière de ce qu'elle a accompapli dans sa vie, elle a quitté ce monde dans la dignité, méprisant la moindre de trace de pitié qu'on pouvait lui témoigner. La spéciale nous a quittés et, qu'elle le voulait ou non, je ne peux m'empêcher de ressentir de la tristesse. Adieu, petite niaiseuse à lunettes !
Qu'elle repose en paix.