Les mots de la fin

Estonie 4 : Coronavirus et transports publics


Daniel Ducharme | Société | 2020-12-15


Aujourd'hui, dans la Presse, le sujet du jour est encore et toujours le président clownesque des États-Unis qui refuse de céder sa place au nouveau président élu. Tiens, je me tourne vers l'Estonie pour changer…

Ce matin, on annonce que le pays enregistre 132 cas de Covid-19 dans les dernières vingt quatre heures. Bien qu'il y ait six personnes aux soins intensifs, aucun décès n'est à déplorer. 132 cas contre plus de 100 000 aux États-Unis. Franchement, restons en Estonie.

Les autorités de santé publique recommandent le port du masque dans les transports collectifs. Savez-vous que les transports publics sont gratuits en Estonie ? En effet, depuis le 1er juillet 2018, personne n’a besoin de débourser le moindre sou pour monter dans un bus ou dans un tramway. Pourquoi n’envisagerait-on pas une pareille politique au Québec ? Les pistes cyclables, je n’ai rien contre, mais il y a des obstacles majeurs à sa généralisation dans une ville comme Montréal, tout comme dans la plupart des villes du Québec, d’ailleurs. Le premier obstacle, et il est de taille, c’est le retour, année après année, de l’hiver en décembre… On dira bien ce qu’on voudra, mais faire du vélo au mois de janvier demande une certaine dose de courage que tout le monde n’a pas. En plus, même sur des pistes déglacées, le danger de chute est bien réel. Et puis, vous savez, à l’instar de certains automobilistes, de nombreux cyclistes ne respectent rien. Ni les stops, ni les passages piétonniers, ni la limite de vitesse dans une zone particulièrement achalandée. Les collisions entre piétons et cyclistes sont de plus en plus nombreuses. Certes, on n’en meurt pas… mais les blessures peuvent être importantes. Bref, le vélo c’est bien, mais de bons transports publics, c’est mieux pour tout le monde, y compris pour ceux et celles qui habitent en périphérie, trop loin pour emprunter un vélo pour se rendre au travail. Et je ne mentionne pas les personnes âgées pour qui le vélo ne saurait constituer une alternative au bus et au métro.

Mais revenons au sujet initial : la gratuité des transports publics. Plus tard dans la journée, j’en ai discuté avec mes amis lors d’une conférence téléphonique. Que voulez-vous ? Tous les moyens sont bons pour nous « voir » en cette période maudite. Une première question n’a pas tardé à venir : « En tant que société, a-t-on les moyens de s’offrir un service gratuit de transports publics ? », a demandé Diane, la compagne de l’ami Pierre. Diane a toujours fait preuve d’un sens de la réalité hors du commun, et elle a droit à toute mon admiration. « Surtout que la STM se trouve déjà en déficit en raison de la baisse de fréquentation des bus et du métro attribuable à la crise sanitaire », a ajouté Lyne, personne aussi réaliste que Diane dans ses vues, même si elle dissimule en elle un torrent d'indignation  prêt à déborder à tout moment. Et d’autres arguments ont fusé aussi, tous aussi pertinents les uns que les autres. « Le financement est essentiel au développement des transports publics, au prolongement des lignes du métro vers l’est, au déploiement d’un tramway, etc ». Là-dessus, nous pouvons facilement énoncer un contre-argument : en dépit de l’augmentation constante des tarifs au cours des vingt-cinq dernières années, à l’exception du métro vers Laval, il n’y a eu aucun investissement massif. Aussi la ligne verte s’arrête à la station Honoré-Beaugrand depuis 1976. Quant à la ligne bleue, il y a bien vingt-cinq ans qu’on parle de son prolongement jusqu’aux Galeries d’Anjou… Je sais, une annonce a été faite récemment… mais il y a loin de la coupe aux lèvres. En conséquence, l’argument du financement par les usagers des transports publics ne tient pas la route…

Pour clore ce débat qui n’en est pas vraiment un, j’aimerais qu’on s'interroge sur le coût d’un système de perception du réseau du transport en commun. Combien a-t-il fallu dépenser en recherche et développement pour mettre au point la carte OPUS, par exemple ? Des millions de dollars, assurément. Et quel est le budget récurrent de la perception ? L’entretien des tourniquets, les boîtes de paiement, le personnel directement affecté à la perception… Alors, je me dis, sans doute très naïvement, que, si on retranchait ces dépenses du budget total des opérations de la STM, peut-être que la gratuité pourrait être envisageable.

En tous les cas, l’Estonie l’a envisagée et l’a appliquée et ce, non seulement à Tallinn, la capitale, mais dans tout le pays.


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