Les mots de la fin

Blogue de Daniel Ducharme

The Words, le cinéma et la littérature (film)


Daniel Ducharme | Critiques | 2015-01-15


Il a plu ces derniers jours. Alors, contrairement à mon habitude, par un soir de déprime je suis avachi dans mon fauteuil pour voir, en compagnie de mon épouse, le film américain The Words, traduit simplement par Les mots en français. En voici un résumé succinct. – Un jeune homme se consacre à plein temps à l’écriture, rêvant d’être publié par une maison d’édition de New York. Bien entendu, comme des milliers d’écrivains d’avant l’avènement des technologies de l’information et des communications, il a soumis ses manuscrits à des dizaines d’éditeurs et, en retour, ils n’a reçu que des lettres stéréotypés de refus, quand il en recevait… Un jour, pendant son voyage de noce à Paris, sa femme lui offre une vieille serviette en cuir découverte au fond d’un bazar. De retour à New York, il s’aperçoit que la serviette contient un manuscrit. Après l’avoir lu, il est subjugué par les mots de ce document qui pénètrent en lui comme des dards. Et voilà qu’il s’approprie le manuscrit… Après l’avoir recopié, il le soumet à un éditeur qui l’accepte d’emblée. Et c’est ainsi qu’il devient un auteur à succès. Tout va bien jusqu’à ce qu’il rencontre un vieillard dans un parc. Il s’agit du véritable auteur du manuscrit… – Je ne vous en dis pas plus, histoire de ne pas gâter votre plaisir si l’envie vous vient de voir ce film.

The Words

Les mots est certes un bon film sur le plan cinématographique, notamment en raison de son procédé narratif qui comporte plusieurs niveaux spatio-temporels et qui nous plonge dans une histoire où tant l’écrivain que le vieillard se retrouvent parfois dans les années 1950, parfois aujourd’hui, parfois demain même… Et bien entendu, quand il est question de littérature, la France est là, pays mythique aux yeux des Américains qui cultivent encore l’image de l’écrivain inspiré, capable de pondre une œuvre monumentale en quelques semaines pour la jeter à la face du monde. C’est peut-être cela que je reproche à ce film: véhiculer cette image éculée de l’écrivain qui, saisi par le feu créateur, n’aurait pas besoin de "travailler" pour pondre l’Œuvre avec un grand O. Certes, il arrive qu’on puisse rédiger une histoire rapidement, comme soufflé par le vent d’une inspiration qui nous pousse à sortir ce qui gît en nous. Mais combien d’heures, de semaines, de mois de relecture, de correction, de réécriture accompagnent cet acte créateur ? Et puis, vous savez quoi ? Le créateur ne se contente pas d’une seule œuvre… Dans le film, l’auteur du manuscrit n’a plus écrit une ligne après que sa femme française l’eût oublié dans un train. Drôle d’écrivain, s’il en est. Un écrivain travaille par projet. Dès qu’un manuscrit est achevé, il en débute un autre. Mais il est vrai que ça accroche moins le spectateur d’un film américain…

Les mots (The Words), film américain réalisé par en 2012 par Brian Klugman et Lee Sternthal avec Bradley Cooper, Zoe Saldana, Jeremy Irons, Ben Barnes, Dennis Quaid et Olivia Wilde. Durée: 1h37


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