Les mots de la fin

Au milieu de mes souvenirs


Daniel Ducharme | Poésie | 2014-07-15


Je me tiens debout au milieu de mes souvenirs
Relisant les mots tendres, les mots si gentils,
Les paroles de ces hommes et femmes qui, pour la plupart,
M'ont oublié, abandonné et trahi.
Je les ai pourtant aimés, ces amis.
Pour eux, je me suis donné sans compter
Dans un élan de fraternité...
Mais aussi… je les ai tenus loin de moi, à l'écart.
Pendant des années de vie, loin, dans d'autres pays.
Voilà pourquoi je ne peux pas leur en vouloir.

Je me tiens debout au milieu de mes souvenirs.
Pourquoi ai-je entrepris de trier, d'archiver
Toutes ces images dont personne n'a cure ?
Il y a longtemps qu'elle est terminée, l'aventure.
Il y a longtemps que la source s'est tarie
Que faute de bois le feu est devenu cendre.
Et moi, tout comme les rêves de décembre,
Vifs, froids, il ne me reste plus qu'à mourir.

Je me tiens debout au milieu de mes souvenirs.
Des éclats de jeunesse encore bondissent sur ma peau
Fanée, ridée, usée par les mois et les années.
Et, vieux déjà, je me tiens debout devant le miroir.
À qui, sinon à moi-même, pourrais-je en vouloir ?
Peut-être à ceux qui ont refusé de me voir
Et qui ne m'ont ouvert ni leur cœur ni leur porte
Alors que je ne cherchais qu'une oreille attentive
Pour écouter en silence mes plaintes vives
Et atténuer ainsi ce désespoir qui me porte.

Je me tiens debout au milieu de mes souvenirs
Fuyant du même coup mon passé et ma peine,
Et le regard posé sur tous ceux que j'aime
Je renonce à hier, lui préférant demain
Mais je ne vois plus rien au bout du chemin
Que le vide immense au-delà du mur devant lequel je me tiens.
Alors je me retourne vers l'arrière
Là où sont réunis mes souvenirs au milieu desquels je me fonds
Et vers eux je me laisse glisser
Comme dans un puits sans fond.


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